Coin de plage à Ramsgate, Berthe Morisot

Coin de plage à Ramsgate, 1875, Berthe Morisot

Coin de plage à Ramsgate, 1875, hst, 38 x 46 cm, Berthe Morisot, collection particulière, restée dans la famille de l’artiste.

Quoique son attirance pour Berthe fût très importante, Édouard Manet était déjà marié.

Son jeune frère Eugène eut l’heureuse initiative de demander la main de Mlle Morisot pendant l’été 1874, alors que les familles Manet et Morisot se trouvaient en villégiature à Fécamp. Le mariage a lieu dans l’intimité le 22 décembre et les jeunes mariés partirent en voyage de noces en Angleterre à l’été 1875. Berthe peignit beaucoup à Wight ou comme ici à Ramsgate, à l’embouchure de la Tamise.

Mais était-ce à Ramsgate, ou à Cowes (île de Wight) ? Les experts en débattent toujours.

Le biographe de Berthe, Armand Fourreau, parle de son « talent de peintre des élégances mondaines ». et ajoute : « Coin de plage à Ramsgate … une simple étude, est une page vibrante de lumière mais d’une lumière adoucie et comme voilée légèrement par une brume matinale de chaleur : sur une eau mollement clapotante se balancent, à l’ancre, vapeurs et voiliers dont les fins gréements prestement tracés du bout du pinceau rayent la bande horizontale d’un ciel opalin étalant sa délicate teinte gris de perle au-dessus de la douce émeraude de la mer et du sable gris tendre de la plage où passent d’amusants petits personnages témoignant de l’écriture la plus vive et la plus spirituelle du pinceau, comme cette élégante lady portant robe à tournure avec corsage noir bordé de galons blancs et arborant un chignon d’or surmonté d’un petit chapeau de paille claire, ou cette autre jeune femme, vêtue d’un costume rose et coiffée d’un canotier blanc, qui s’avance un peu plus loin. » À retrouver chez VisiMuZ, bien sûr !

15 ans après Boudin à Deauville et Trouville, Berthe Morisot peint la femme élégante, en plein air, en se souciant de la mode.

Nous ne sommes plus aujourd’hui très sensibles aux aspects de la mode vestimentaire du XIXe siècle, parce que nous ne l’avons pas connue, mais les amateurs de l’époque étaient très attentifs au respect des usages et des modes. Madame Morisot, par son milieu et son extrême sensibilité, était à même de leur offrir la crême de la crème (« The cream of society »).

Photo Courtesy The Athenaeum, rocsdad

Devant la psyché, Berthe Morisot

Devant la psyché, Berthe Morisot

Devant la psyché, 1890, h.s.t., 55 x 46 cm, Berthe Morisot, collection particulière.

Vers 1890, Berthe a peint plusieurs scènes de femme à sa toilette. Un thème particulièrement ancré dans la vie moderne, cher aussi à Degas, et pour lequel elle suit le conseil d’Edmond Duranty (La Nouvelle Peinture, 1876) : « peindre son modèle de dos, et être en rupture avec les règles du passé ». Le décor est celui de son appartement de la rue Weber.

Bien que le tableau soit toujours dans une collection privée, il est vite devenu célèbre. La psyché, grand miroir sur deux axes et que l’on peut incliner à volonté, est un meuble emblématique de la fin du XIXe. Zola par exemple en fait mention dans Nana (1881).

Le nom de psyché est dérivé de celui d’une princesse de la mythologie grecque, dont la beauté excita la jalousie de la déesse Aphrodite. Celle-ci demanda à son fils Éros (Cupidon) de tourmenter Psyché mais celui-ci tomba amoureux de la belle. Aphrodite lui imposa des épreuves que Psyché, aidée des dieux, réussit. Elle fut élevée alors au rang de déesse et gagna l’immortalité. La fille de Cupidon et de Psyché est Volupté.

La touche de Berthe est reconnaissable et la plus « impressionniste » de toutes.

Un tableau à retrouver avec tous les autres dans la biographie de Berthe Morisot par Charles Fegdal, enrichie par VisiMuZ.

12/04/2016

Photo Courtesy The Athenaeum, rocsdad

La Blanchisseuse, Henri de Toulouse-Lautrec

Lautrec, La Blanchisseuse

La Blanchisseuse (Carmen Gaudin), 1889, hst, 93 x 75 cm , collection particulière, catalogue S327.

Carmen Gaudin était une ouvrière de Montmartre. Ses cheveux roux ont tout de suite attiré Lautrec, qui a été toute sa vie un grand admirateur des femmes rousses. François Gauzi, qui a publié ses souvenirs sur Lautrec, a raconté la première fois que Lautrec et Rachou croisèrent la jeune femme :

«… une jeune fille, vêtue simplement comme une ouvrière, mais dont la chevelure cuivrée fit s’arrêter Lautrec qui s’écria, enthousiasmé :
– Elle est bath ! Ce qu’elle a l’air carne ! Si on pouvait l’avoir comme modèle, ce serait merveilleux. »

En 1884, à la demande de Lautrec, Henri Rachou l’aborda et réussit à l’amener à l’atelier de la rue Ganneron, qu’il partageait avec Lautrec. Rachou sera nommé beaucoup plus tard conservateur du musée de Toulouse.

Lautrec va réaliser au moins cinq portraits à l’huile de la jeune femme et de très nombreux dessins.

Notre portrait du jour est peut-être le plus beau de tous. En cette année 1889, Lautrec est définitivement sorti de ses années d’apprentissage. La composition, la posture, le traitement de la lumière, l’aura du modèle ont ensemble concouru au succès de cette toile. Elle est devenue le 1er novembre 2005, chez Christie’s à New York, la plus chère adjugée à ce jour pour l’artiste avec un montant de 22,416 millions de dollars.

Jamais Lautrec n’a osé lui demander de poser nue. Il avait parfois des délicatesses et des timidités qui ne lassent pas d’étonner.

La jeune femme avait pris goût au métier de modèle et va poser pour d’autres peintres, comme Alfred Stevens et… Berthe Morisot.

Dès 1885, c’est elle qui pose dans le fameux Nu, vu de dos. En tant que modèle, elle se faisait parfois appeler Carmine Gaudin. Berthe Morisot, alors encore inexpérimentée dans la peinture de nu, avait demandé des conseils à Renoir.

Morisot, Nu, vu de dos

Nu, vu de dos, 1885, hst, 55,3 x 46,2 cm, Berthe Morisot, collection particulière

Des aventures à retrouver dans la toute nouvelle monographie de Lautrec et dans celle de Morisot… chez VisiMuZ, évidemment.

24/02/2016

Photos
1 wikimedia commons File:Henri_de_Toulouse-Lautrec_018.jpg Usr Sandik~commonswiki
2 Courtesy The Athenaeum, rocsdad

Chrysanthèmes (Le Panier renversé), Berthe Morisot

2 novembre, fête des morts, symbolisée par tous ces chrysanthèmes dans les cimetières.

Chrysanthèmes, Berthe Morisot

Chrysanthèmes (Le Panier renversé), 1885, Berthe Morisot, collection particulière.

Berthe Morisot est heureuse en 1885. Elle vient de faire construire avec son mari Eugène Manet l’hôtel particulier de la rue de Villejust. Berthe s’est occupée de la décoration. Elle met elle-même la main à la pâte (ou plutôt à la palette) dans les pièces de réception et réalise plusieurs tableaux tels que Vénus dans la forge de Vulcain, une copie d’après Boucher, L’Oie, une grande toile verticale, un Panier de jonquilles et notre Panier renversé.

C’est là que les Manet vont recevoir, dans ces années heureuses, leurs amis Renoir, Mallarmé, Degas, Claude Monet, Caillebotte, Théodore Duret, Puvis de Chavannes, James Abbott Whistler. Mallarmé racontera en 1896 qu’il étaient « hôtes du haut » dans ce salon du soir qui était aussi dans « la matinée, atelier très discret, dont les lambris Empire encastrèrent des toiles d’Édouard Manet », le frère et beau-frère décédé deux ans plus tôt.

L’ami Mallarmé toujours, dans des quatrains parus en 1894 sous le titre Les Loisirs de la Poste, eut l’idée de retranscrire en vers l’adresse de ses correspondants et amis sur les enveloppes. Ainsi, il écrivait sur l’enveloppe, pour envoyer ses lettres à Berthe Morisot :

« Apporte ce livre, quand naît
Sur le Bois l’Aurore amaranthe,
Chez Madame Eugène Manet
Rue au loin Villejust, 40. »

Une des si nombreuses belles histoires à retrouver dans la monographie de Berthe Morisot, enrichie par VisiMuZ.

02/11/2015

Dim 46 x 55,6 cm
Courtesy The Athenaeum, rocsdad

Bateaux sur la Seine, Berthe Morisot

26092015_Morisot_Cologne

Bateaux sur la Seine, 1880, Berthe Morisot, Wallraf-Richartz Museum, Cologne.

Saga hebdo 2/2

Berthe Morisot (1841-1895) avait 39 ans à l’époque de notre tableau. Elle s’est mariée à la fin de 1874 avec Eugène Manet. Julie, leur fille, a un an et demi en cet été 1880. Alors à cette période, les voyages sont un peu plus difficiles. Villeneuve-la-Garenne était encore un hameau de Gennevilliers, où Berthe avait déjà passé le printemps de 1875, et restait, comme le dit Armand Fourreau dans sa biographie (publiée chez VisiMuZ), « une charmante localité suburbaine. »

Berthe a choisi ici de représenter comme Sisley, un coin de campagne, ce qui n’est pas tout à fait la réalité. L’île Saint-Denis vivait des activité liées au fleuve : les bateliers faisaient transiter leurs péniches, la blanchisserie était une activité importante (voir toujours de Morisot son Percher de blanchisseuses peint non loin de là) et les activités de construction navale commençaient à s’implanter. C’est ce dernier point qui attirera Caillebotte à Gennevilliers où il va acheter une maison l’année suivante.

Contrairement au tableau de Sisley d’hier, le pont n’est pas ici le motif principal du tableau, mais plutôt les barques et les canots. Le fait de couper les barques du premier plan était un geste audacieux (à cette époque). Contrairement à la construction solide de Sisley, le tableau de Morisot est peint légèrement, presque esquissé. Notez par exemple la différence sur le rectangle vert de la maison à droite du pont dans les deux tableaux. Chez Morisot, il se confond presque avec l’herbe de la berge. Elle a toujours été à la recherche de la plus grande économie de moyens possible. Elle aurait pu faire sienne la devise « Less is more » (phrase appliquée d’abord à Andrea del Sarto par le poète Robert Browning, puis reprise par l’architecte Mies van der Rohe).

Le site du tableau n’a été identifié que vers la fin du XXe siècle grâce au rapprochement avec la toile de Sisley. Le titre, donné par Mary Cassatt, premier propriétaire de la toile, ne donnait aucune indication de localisation. Mary Cassatt avait acheté la toile à son amie Berthe (les deux femmes se voyaient très souvent) au printemps 1881 pour la collection de son frère Alexander.

À retrouver bien sûr avec tous les autres, dans la collection des livres d’art numériques de VisiMuZ !

26/09/2015

Dim 25,5 x 50 cm
Photo courtesy The Athenaeum, Usr rocsdad

Le Port de Nice, Berthe Morisot

31072015_Morisot_Dallas_Nice

Le Port de Nice, 1881-82, Berthe Morisot, Dallas Museum of Art.

Les tableaux de Nice et tous les autres dans la monographie par VisiMuZ ici

Pendant l’hiver 1881-82, la famille Manet-Morisot a vécu à l’hôtel Richmond, c’est-à-dire au-dessus du port. Pour se trouver au plus près de ses sujets et éviter de devoir peindre sur un quai encombré par les promeneurs, Berthe se faisait conduire par un pêcheur sur une barque au milieu du port. Sa fille Julie a écrit dans son journal : « Maman peignait en barque au milieu du port et moi je la regardais du quai, ayant bien envie d’aller avec elle dans le bateau puis en même temps en ayant très peur. »
L’eau est le vrai sujet de cette toile, qui contraste avec l’étrave du bateau blanc. À l’arrière-plan, un fouillis de coques et de mats masque les immeubles des quais. Berthe pouvait ensuite terminer ses toiles depuis la fenêtre de sa chambre. Elle a choisi de présenter ce tableau à l‘avant-dernière exposition impressionniste de 1882. Son sujet principal est ici le reflet de la lumière dans une eau chahutée par le vent et les mouvements dans le port.

31/07/2015

Dim 38,1 x 46,3 cm
Photo wikimedia commons Morisot_Port_of_Nice_DMA Usr Kelson

Le Cerisier, Berthe Morisot

Le Cerisier, Berthe Morisot

Le Cerisier, 1891, Berthe Morisot, musée Marmottan-Monet, Paris.

Au printemps 1890, la famille Manet-Morisot décide de louer pour la saison une maison à Mézy-sur-Seine, la maison Blotière. Il la garderont pour la saison 1891. Berthe a installé un atelier pour travailler et va utiliser comme modèles sa fille et ses nièces bien sûr, et aussi différents enfants du village. Eugène et Berthe vont aussi découvrir tout près de là, sur la commune de Juziers, le château du Mesnil. Il vont hésiter un moment puis acheter la propriété le 29 novembre 1891.

Le tableau du jour a été peint à la fin du printemps 1891 dans le jardin de la maison Blotière. Julie Manet et Jeannie Gobillard vont en être les modèles. Le tableau sera terminé au retour à Paris dans l’atelier de la rue de Villejust.

Retrouvez la vie de la famille Manet à Mézy et les tableaux de Morisot dans la monogaphie que lui a consacrée Armand Fourreau, enrichie par VisiMuZ : ICI

11/07/2015

Dim : 152 x 85 cm
Photo Courtesy The Athenaeum, rocsdad